Avant 1100, on trouve des « Ecoles » autour des cathédrales (comme à Chartres) ou dans les monastères. Vers le XIIe siècle, l’enseignement s’organise à Paris en facultés qui vont former l’Université (regroupement des professeurs et des élèves).
L’éducation de base (après celle délivrée par les écoles locales) est donné à la Faculté des Arts : trivium (les « humanités », grammaire, rhétorique et logique) et quadrivium (les « sciences », arithmétique, géométrie, astronomie et musique). Les élèves sont âgés de 14 à 15 ans à leur entrée à la faculté des Arts et les études y durent 5 à 6 ans.
Vient ensuite une formation supérieure dans l’une des trois facultés : droit, médecine ou théologie. La science (si l’on excepte la médecine) n’est donc pas enseignée à ce stade supérieur.
Au XII siècle, Paris devient réputée pour la philosophie et la théologie, alors que la science est davantage présente à Chartres, avec par exemple, Fulbert de Chartres (vers 960 – 1028) qui donnera notamment un bref glossaire des équivalents arabe-latin des noms des pièces de l’astrolabe, ou Guillaume de Conches, qui a enseigné vers 1120-1154 et s’intéressa particulièrement aux sciences.
A la fin du XIIe siècle, face à l’explosion du nombre de traductions (notamment de l’arabe), les Ecoles ne peuvent plus suivre et l’Université prend une position de premier plan. A Paris, en particulier, les maîtres de la faculté des Arts essaient de consolider leur position, par rapport aux facultés « supérieures ». Mais la résistance aux idées d’Aristote y est forte. Un synode réuni à Paris en 1210 y affirme que « les livres d’Aristote sur la philosophie naturelle ne doivent pas être lus à Paris, ni en public, ni en privé ».
Sacrobosco fait preuve d’un esprit « neuf » par rapport à la tradition parisienne. Sans doute a-t-il été formé hors de l’université parisienne, certainement à Oxford. Il est familier avec au moins deux des livres d’Aristote, « interdits » à Paris : les Metheoroligica, où Aristote distingue les mondes sublunaires et supralunaires et le De generatione et corruptione où sont montrés les changements dus à la position du Soleil sur l’écliptique. De plus, Sacrobosco, à la différence d’Aristote, pense que la nature possède une sorte de structure mathématique sous jacente, idée proche de celles de Platon qui favorise une science quantitative (voir le traité de Sacrobosco sur l’arithmétique des chiffres arabes).
Le Portail Royal de la cathédrale de Chartres date du milieu du XIIe siècle, une centaine d’années avant que ne fleurisse Sacrobosco, et à une époque où « l’Ecole de Chartres » est au sommet de son « art ».
Jacques Le Goff affirme dans Les intellectuels au Moyen Age que « Chartres est le grand centre scientifique du siècle. Les arts du trivium, grammaire, rhétorique, logique n’y étaient pas dédaignés… mais à cette étude des uoces, des mots, Chartres préférait l’étude des choses, des res, qui étaient l’objet du quadrivium : arithmétique, géométrie, musique, astronomie. C’est cette orientation qui détermine l’esprit chartrain. Esprit de curiosité, d’observation, d’investigation qui, alimenté par la science gréco-arabe, va rayonner. »
Bernard de Chartres, qui commence sa carrière d’enseignant vers 1114, est connu pour cette comparaison fameuse, rapportée par Jean de Salisbury :
« Bernard de Chartres disait que nous sommes comme des nains juchés sur des épaules de géants [les Anciens], de telle sorte que nous puissions voir plus de choses et de plus éloignées que n’en voyaient ces derniers. Et cela, non point parce que notre vue serait puissante ou notre taille avantageuse, mais parce que nous sommes portés et exhaussés par la haute stature des géants. »
Ces « géants » sont sculptés dans la pierre de Chartres :
Chapiteaux de la porte de droite du Portail Royal.
En bas, à gauche, penché sur un abaque : Pythagore.
Au dessus : la musique (à gauche) et la grammaire (qui martyrise les élèves).
Au troisième étage : un ange voisine avec Ptolémée (à droite).
A gauche, et de bas en haut : Aristote, la logique et Cicéron.
Portail de gauche : voussures montrant les mois de l’année et le zodiaque.
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Sacrobosco