Il existe une multitude de sortes d'astrolabes : nous nous attacherons à l'astrolabe astronomique (dont on rencontre encore plusieurs types - astrolabe quadrant, astrolabe universel, etc.), non sans avoir fait un détour par l'astrolabe nautique, qui est une simple adaptation du précédent, faite par les Portugais au XVe siècle.
Par opposition à l'astrolabe astronomique, on pourrait qualifier l'astrolabe nautique d'instrument sommaire , dans le sens où il n'a qu'une seule fonction : mesurer (en degré) la hauteur d'un astre (étoile ou Soleil) sur l'horizon (voir ci-contre un astrolabe nautique portugais datant de 1555-Dundee Art Gallery and Museum)
Mais sommaire ne veut pas dire laid ni d'ailleurs inutile : les marins des Grandes Découvertes ont eu un impérieux besoin de se repérer sur les océans. En mesurant la hauteur d'un astre (étoile polaire ou Soleil au méridien) sur l'horizon, ils déterminaient la latitude de leur bateau ; en revanche, ils n'avaient aucun moyen de déterminer leur longitude (le premier procédé simple apparaît tardivement, à la deuxième moitié du XVIIIe siècle, avec l'invention des montres de marine, par l'horloger anglais John Harrison). Bref, il fallait à ces marins une bonne dose de courage, voire d'inconscience, pour se lancer sur les océans. L'astrolabe nautique était donc un instrument précieux et nombre d'entre eux ne sont pas parvenus jusqu'à nous pour s'être usés sur les ponts des navires.
L'astrolabe de mer est un disque de 15 à 30 centimètres de diamètre, lourde plaque de bronze de 15 à 20 millimètres d'épaisseur, évidée dans sa partie haute pour donner moins de prise au vent. L'alidade B (figure 2) porte deux pinnules D et D' par lesquelles on vise l'astre, pendant que l'on tient l'astrolabe par l'anneau A. La visée d'une étoile se fait directement, sans risque pour les yeux (figure 2-1) ; pour le Soleil (trop éblouissant !), il faut impérativement procéder par ombre portée (figure 2-2) : on cherche alors à superposer les ombres des deux pinnules en faisant pivoter l'alidade.
La précision d'une telle mesure est, on s'en doute, très mauvaise : si l'on est adroit, on peut l'estimer à 1°, par beau temps et mer calme (quand cela arrive !). Pour mémoire, 1° de latitude correspond quand même à une centaine de kilomètres…
À première vue, l'astrolabe astronomique (voir ci-contre un astrolabe du Museum of the History of Science, Oxford) lui aussi semble simple : pas de mécanisme complexe ni de système de visée élaboré. Cependant le regard qui s'attarde sur l'instrument devient vite fasciné par ce qu'il voit. L'astrolabe astronomique suscite incontestablement l'émerveillement, car il témoigne à la fois d'une rare maîtrise scientifique, technique et artistique et d'un savoir presque palpable.
Commençons par le décrire, en apprenant à nommer ses différentes parties :
La pièce essentielle, comme support à toutes les autres, est la mère de l'astrolabe, entourée par le limbe. Dans la mère de l'astrolabe, se placent le tympan (il change avec la latitude), puis l'araignée, finement découpée – à la manière d'une toile d'araignée – car elle ne doit pas gêner la lecture sur le tympan (et c'est dans ce travail de ciselage que le facteur d'astrolabe exprime le plus son sens artistique). Un index permet de faire les lectures sur l'astrolabe. L'araignée et l'index peuvent tourner autour du centre de la mère.
Sur le dos de l'astrolabe, à peine visible sur la vue éclatée ci-dessus, nous retrouvons l'alidade et les pinnules de l'astrolabe nautique, dont les fonctions sont d'ailleurs exactement les mêmes sur les deux instruments : quand l'astrolabe est suspendu ou porté par son anneau, elles permettent de mesurer la hauteur d'un astre par rapport à l'horizon.