Écritures ou rendons à Guillaume...
La plupart des manuscrits scientifiques attribués à Guillaume Levasseur, que possède la BnF, porte la marque de Robert Delahousse : c’est grâce à ses indications que l’on peut savoir de façon certaine que Robert Delahousse a copié certaines œuvres dont l’auteur était Guillaume Levasseur.
L'écriture de Robert Delahousse
- du traité de géodrographie où figure sur la première page le nom manuscrit de Delahousse

- du traité de la pratique de la géométrie pratique

- du traité de fabricométrie ou ergastice du point
Ainsi connaît-on l’écriture de Robert Delahousse.
L'écriture de Guillaume Le Vasseur
En revanche on ne connaît pas celle de Guillaume Levasseur lui-même, les manuscrits qui lui sont attribués et qui ne portent pas la marque de Delahousse n’indiquant aucun nom d’auteur.
La seule trace incontestable que l’on ait de l'écriture de Guillaume Levasseur, ce sont les annotations de sa carte de l’océan Atlantique de 1601.
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Ce n’est pas une écriture cursive simple plutôt une calligraphie des noms de lieux qui ne permet pas d’avoir une vue d’ensemble de son écriture courante.
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Pourrait-on par des comparaisons d'écritures identifier un manuscrit original de Guillaume Levasseur ?
L'attribution de la fabricomologie de Columbia
Grâce à Robert Delahousse, on sait que Guillaume Levasseur est l'auteur d'un "traité de fabricométrie ou ergastice du point" . Or il existe deux autres manuscrits au contenu scientifique identique :
- À la bibliothèque municipale de Caen (fabricomologie)
- À la bibliothèque de l'université de Columbia aux USA (Plimpton ms216) (fabricomologie).
Seule l’écriture et la présentation diffèrent de l'exemplaire de Delahousse. On est donc en droit de penser que l’on a affaire à trois copies d’un même manuscrit original (Guillaume Levasseur était professeur de mathématiques, il n’est donc pas étonnant qu’à l’époque, circulent plusieurs copies de ses œuvres réalisées par des élèves aux écritures différentes, dispersées au gré des aléas de leur histoire, dont seules trois nous seraient parvenues), à moins que celui de Caen ou celui de Columbia soit lui-même l’original, ce dont on ne pourrait conclure qu’en connaissant l’écriture de Guillaume Levasseur.
À la BnF, la copie de Delahousse |
À la bibliothèque municipale de Caen |
À la bibliothèque de l’université de Columbia aux USA |
L'attribution du traité des fortifications (BnF)
En examinant tous les manuscrits attribués à des copistes, l'un retient particulièrement l'attention et suscite la réflexion :
le traité des fortifications. La BnF l'attribue à Robert Delahousse. Il porte en effet l'ex-libris d'Antoine de Chesnevarin qui a été détenteur d'autres manuscrits de Robert Delahousse (voir ci-dessus "Les secrets d'un manuscrit conservé à la BnF" / "Le parcours du manuscrit" - pages 9, 10), mais il s'agit d'une déduction sans preuve réelle.
En revanche, son titre précise : "...réduites en art
par M. Guillaume Levasseur de Dieppe, proffesseur de mathématique".

Cette formule signifie-t-elle que nous sommes en présence d'un manuscrit original que Guillaume Levasseur a, en quelque sorte, signé de cette manière ?
Si l'on compare cette formule à celle écrite par Robert Delahousse sur
le traité de fabricométrie on constate que Robert Delahousse, se désignant comme l'auteur de la copie du traité de Guillaume Levasseur, utilise le même style :
"... ce traité escrit et figuré
par Robert Delahousse..."
en précisant :
- sa fonction : receveur des tailles
- le lieu : l'ellection de Lyons
tout comme Guillaume Levasseur se désignerait comme l'auteur du
traité des fortifications en précisant
- sa fonction : proffesseur de mathématique
- le lieu : Dieppe.
Cette similitude de formulation peut-elle permettre de penser que le
traité des fortifications est de la main de Guillaume Levasseur ?
Si on l'admet comme hypothèse de travail, il devient intéressant de comparer l'écriture du
traité des fortifications à celle des manuscrits "anonymes" tels les manuscrits des
traités de fabricomologie de Caen et de Columbia ainsi qu'à celle de la carte de l'Atlantique malgré le peu de mots utilisables sur celle-ci pour notre étude.
L’écriture du manuscrit de Caen ne semble pas correspondre à celle du
traité des fortifications.
En revanche, on relève beaucoup de similitudes entre le graphisme des lettres du manuscrit de Columbia, du
traité des fortifications et de la carte de l'Atlantique. Par exemple :
ch, q, l, d, r, g, P, N, t relevées sur la carte de l'Atlantique sont de même style que celles du
traité de fabricomologie de Columbia,
de même que l'on retrouve une concordance graphique forte entre les mots du traité de Columbia et ceux du
traité des fortifications.
En conséquence, la carte de l'Atlantique de 1601 étant, sans conteste, de la main de Guillaume Levasseur, je crois pouvoir affirmer que le
traité de fabricomologie de Columbia est un manuscrit original authentique du Maître et confirmer que le
traité des fortifications lui appartient également.
L'attribution du traité des sinus
Le traité des sinus attribué à G. Le Vasseur ne porte la marque d’aucun copiste ni de référence à lui-même.
La comparaison du graphisme de ce traité avec celui des fortifications, de la carte de 1601 ou de la géométrie pratique permet de considérer cette œuvre comme écrite de la main du maître.
FORTIFICATIONS
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Traité des SINUS
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Une erreur d'attribution
L’attribution du
Premier Traicté de la mathématique à G. Le Vasseur se heurte à de nombreux arguments. Parmi eux, l’analyse de l’écriture.
On ne connaît pas la date de ce manuscrit, mais la référence à des instruments en usage à la fin du XVIe nous a invité à supposer qu’il puisse être un cahier d’apprentissage de Guillaume Le Vasseur, une supposition qui pourrait être confortée par un graphisme peu soigné et l’usage du qualificatif « premier ».
Mais un examen attentif de l’écriture montre que la graphie de ce manuscrit est très éloignée de celle que nous attribuons à Guillaume Le Vasseur. Si l’écriture est un élément vivant qui évolue au cours de la vie, une transformation aussi radicale nous semble peu probable. En témoignent les exemples suivants :
1er traité | |
Le Vasseur (Traité des fortifications) |
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est |
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adiousté |
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et |
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il faut |
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jusque |
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faites faire |
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on pourrait multiplier les comparaisons de cette écriture malhabile avec celle de G. Le Vasseur beaucoup plus mature, qui confirmeraient notre hypothèse :
le premier traité de la mathématique n’est pas un écrit de G. Le Vasseur.